L'HEURE DES COLONELS 2

 


Création le 11 janvier 2022

Si le FLN veut se renouveler après l’échec de la bataille d’Alger, il lui faut trouver des armes. Le docteur Lamine réussit à en trouver 25 000, mais il en faut beaucoup plus. L’Allemagne et la Suisse sont des lieux privilégiés pour les trafiquants, qui se procurent des certificats « bidon ».

Mais, de son côté, le SDECE (Service de Documentation Extérieure et de Contre-Espionnage) engage une bataille de l’ombre contre le trafic d’armes et de munitions, qui  se propage en Suède, en Suisse et en Tchécoslovaquie. Par exemple un cargo chargé d’armes explose à Hambourg. Tous les coups sont permis. Le SDECE est surnommé « La Main Rouge ».

Les armes du FLN transitent par la Tunisie ; l’armée française commence la construction d’une ligne de barbelés électrifiés à la frontière tunisienne, appelée "Ligne Morice".

 

Le Président Bourguiba

C’est alors qu’éclate l’affaire franco-tunisienne de Sakiet Sidi-Youssef : la plupart des armes du FLN transitent par la Tunisie, avec la complicité du chef d’État Bourguiba. Le 11 janvier, 300 combattants algériens de Sakiet Sidi Youssef attaquent, en territoire algérien, une patrouille française de cinquante soldats (quatorze soldats français tués, deux blessés et quatre prisonniers). Le bombardement aérien de Sakiet Sidi Youssef est une opération de représailles menée par le commandement local de l’armée française sur ce village tunisien, le 8 février 1958, causant la mort de plus de 70 personnes, dont une douzaine d'élèves d'une école primaire, et 148 blessés parmi la population civile. Bourguiba exploite à fond cette affaire au plan international, devant le Conseil de Sécurité des Nations Unies. Les Anglo-Américains proposent leurs « bons offices ».

Les conséquences seront nombreuses suite à cet imbroglio. Farès, ancien Président de l’Assemblée algérienne, se veut être les "bons offices" entre la France et le FLN. Boussouf, qui commande la wilaya oranaise, se soucie de perfectionner son organisation avec son ambitieux, intelligent et efficace adjoint Boumedienne, âgé de 32 ans, en particulier dans les télétransmissions. Trinquier, qui a trop bien réussi à gagner la bataille d’Alger, est renvoyé à Pau « pour gagner ses galons de colonel ».

En trois mois, le double réseau électrifié à la frontière tunisienne, jusqu’à 7 000 volts, est devenu opérationnel, sur 320 kilomètres. Le barrage devient efficace à 95%. C’est le général Vanuxem qui le gère.  Si l’armement du FLN augmente, son moral baisse, même si la population locale lui est de plus en plus favorable. Marocains et Tunisiens poussent le FLN à négocier. L’idée d’un gouvernement provisoire de la République algérienne est lancée.

Pendant ce temps, la cote du général de Gaulle monte. Mais confidentiellement, à l’un de ses invités, il confie que « bien sûr, l’Algérie sera indépendante »,  avec une coopération et une association de la France.

L’ILLUSION

En ce début de 1958, les Européens d’Algérie se sentent mal aimés par une métropole qui ne les aime pas trop. De son côté Michel Debré s’agite en faveur de l’action du général de Gaulle. Quant à l’armée,  elle se compose de trois groupes : les troupes de choc, les « bidasses » et les jeunes officiers SAS qui se donnent tout entiers à la pacification. Ces derniers se sont engagés auprès des musulmans, ils ont remplacé un État défaillant dans tous les domaines. Entre Salan et Lacoste, une petite guérilla se développe.

En France, Jacques Chaban-Delmas veut « domestiquer » tous les complots militaires et civils d’Alger, et les canaliser vers le gaullisme. À Alger, le 2 avril 1958, une manifestation  s’organise pour que vive l’Algérie française. Ils sont 30 000. Une manifestation grandiose s’organise pour le 13 mai, avec rendez-vous sur la place devant l’immeuble du Gouvernement général. Le bâtiment est envahi. Le général Massu est mis dans l’obligation de constituer un Comité de Salut public … Salan finit par s’écrier « Vive de Gaulle ». Le nom de de Gaulle est apprécié par la masse musulmane. Mais il faut faire participer la Casbah : toute la nuit, dans les SAU (SAS urbaines), on fabrique des pancartes, des calicots, des banderoles. Et le miracle se produit « Voici nos frères musulmans » (Ce que Yves Courrière ne sait pas, c’est « qui a déclenché le miracle » …). Ce 16 mai, tout est redevenu possible.


Mais pour beaucoup d’Européens, l’intégration est celle de l’Algérie à la métropole, et non celle des Musulmans aux Européens. Pour sortir du chaos, un plan « Résurrection » d’invasion de la France est concocté. Le général de Gaulle est mis au courant. Le Président de la République René Coty a un choix difficile et urgent …

Le général de Gaulle arrive à Alger. se fait expliquer la situation, et conclut : « L’Algérie, c’est moi ! ».

Place du Gouvernement Général

 
La suite dans un prochain article.