ORAN 1732-1912 1



Création le 18 janvier 2021

Saddek Benkada est un sociologue et historien algérien. Il a été Président de l'Assemblée Populaire Communale d'Oran (Maire), du 9 décembre 2007 au 21 novembre 2010. Il est membre fondateur de la Fondation Émir Abd el-Kader.

Entre autres, il est actuellement chercheur associé et membre du Comité de rédaction de la revue Insaniyat éditée par le CRASC, dont les objectifs sont :
- Développer la recherche fondamentale et appliquée en Anthropologie sociale et culturelle, en liaison avec les besoins du développement national ;
- Effectuer toutes recherches présentant un intérêt pour l’avancement des sciences sociales et humaines en Algérie et contribuer à la valorisation de leurs résultats ;
- Assurer la formation, le perfectionnement et la qualification des chercheurs et du personnel de soutien à la recherche ;
- Organiser et promouvoir des rencontres entre chercheurs en vue de favoriser les échanges et la maîtrise de l’information scientifique ;
- Publier une revue scientifique de qualité pour diffuser les résultats de recherche et maintenir un lien régulier entre les chercheurs.


Son livre « ORAN 1732-1912", extrêmement documenté, est un essai d’analyse de la transition  historique d’une ville algérienne vers la modernité urbaine.
 

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Le « petit port : Mers-el-Séghir » d’Oran a été exploité par les marins andalous, précieux alliés de la flotte ottomane dans la guerre de course. En 903, deux généraux andalous ont fondé la petite cité de Ouarhan.
 

En occupant Oran, les Espagnols ont  introduit le modèle urbain de la ville médiévale fortifiée. Dès la première occupation espagnole (1509-1708), le tissu arabe musulman a été  complètement transformé pour laisser place à la nouvelle organisation urbaine. À la deuxième occupation, Oran a été conçu comme une place défensive, s’inspirant des théories de Vauban, et ceinturée par une enceinte fortifiée qui a fait de la ville un véritable îlot. La ville a été cadastrée, avec une place centrale, la « Plaza Mayor », qui était le lieu des grandes manifestations officielles.


Oran en 1757

 L’alimentation en eau était assurée par de nombreuses sources. L’évacuation des eaux était assurée par deux conduites. La ville a grandi, non par le nombre de ses habitants, mais par le brassage des peuples des deux rives de la Méditerranée, qui y trouvaient intérêt ou refuge. 

Quelques relations difficiles entre le bey de Mascara et le gouverneur espagnol d’orange,  aboutissent à un traité de paix en 1786. Mais deux événements majeurs interviennent : en politique, la révolution française, et un terrible tremblement de terre en octobre 1790. L’Espagne ne cherche plus à s’incruster à Oran, et le bey de Mascara reprend définitivement possession de la ville en 1792, sous la bannière du djihad.
 

Le Bey entreprend une politique de repeuplement en faisant appel aux travailleurs des autres villes algériennes et en transférant sa capitale de Mascara à Oran. C’est un succès relatif : favorable aux Musulmans et aux Juifs, défavorable aux Espagnols.

 On voit alors s'amorcer un nouveau mode d'appropriation des terres de conquête, y compris celles des Mogatazes ("baptisés", qu'on pourrait considérer comme des "harkis" avant l'heure). En particulier les terres maraîchères, maisons et moulins, de la banlieue d'Oran, redistribuées aux Musulmans et aux Juifs, en particulier lors de la création de biens religieux "habous".

Après la famine de 1785, et la peste de 1786, le 9 octobre 1790, la ville d'Oran est surprise par un terrible tremblement de terre, suivi par un incendie. La vieille ville est complètement détruite, d'où la nécessité de créer une "Ville neuve" dès 1792 par le grand Bey Mohamed el Kébir, un excellent urbaniste, mais aussi un excellent homme politique, qui avait déjà fait preuve de son efficacité dans d'autres villes de l'Oranie.

De nombreux équipements publics sont construits : mosquées, mausolées, synagogues,  réseaux d'alimentation en eau et d'assainissement, aqueducs, ouvrages de défense, prisons ...

Mohamed el Kébir avait déjà développé une politique d'exportation de produits agricoles vers l'Europe à partir du port d'Arzew, qui s'est spécialisé dans l'agro-exportation.

Oran - 1846

L'OCCUPATION  FRANÇAISE DE 1830

Le 24 juillet 1830, quatre navire de guerre français se présentent devant Mers el-Kébir. Après une phase "diplomatique", un détachement de 110 marins occupe le fort de Mers el-Kébir sans combat, avec l'assentiment du Bey Hassan,  en même temps que survient la révolution française ... Les troupes françaises doivent réembarquer. En raison de l'éventualité de l'arrivée de troupes marocaines, les Français redébarquent à Oran fin 1830.

Il s'agit seulement d'une "occupation restreinte" : le général Clausel y croit si peu qu'il préfère se décharger de ce fardeau sur le bey de Tunis en donnant à ses deux fils les provinces d'Oran et de Constantine ... Mais cette idée de protectorat tunisien fait l'unanimité contre elle : alors le bey tunisien retourne à Tunis avec ses troupes ; c'est alors que commence l'administration française.

Avec le général Boyer, au surnom de "Pierre le cruel", qui arrive à Oran le 14 septembre 1831, commence l'une des plus sombres périodes des opérations coloniales dans l'Ouest algérien. Son successeur, le général Desmichels, est aussi expéditif : mais il est en butte à la résistance croissante des troupes de l'Émir Abd el-Kader. Le traité de la Tafna n'y changera rien ; son abandon conduira à une première victoire d'Abd el-Kader à la bataille de la Macta, à laquelle succèdera une répression militaire contre l'insurrection des populations locales.

Le traffic portuaire ne cesse de se développer. Les quartiers de la ville se développent également, ce qui justifie une politique ambitieuse de rénovation des réseaux d'adduction d'eau et d'évacuation des eaux usées et pluviales. Les grands travaux du port commencent en 1848.

Le général Bugeaud inaugure aussi une politique de construction de "villages indigènes". En 1845, c'est la création de Médina Jdida et d'une quarantaine d'autres villages, pour éviter une installation très sommaires des population dans les anciennes ruines dues au tremblement de terre de 1790. Les ingénieurs du Génie ont été compétents, et dotés d'un matériel convenable ; ils ont aussi été des découvreurs en archéologie.

En résumé, l'affrontement des deux pouvoirs civil et militaire, à l'avantage de ce dernier, aura conduit à une politique de regroupement en Afrique, dans le cadre de mesures préventives de sécurité aux abords des villes.



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