LA CITÉ DE DIEU


Modification 1 le 27 octobre 2016

Saint Augustin a été un Berbère, un Romain et un bavard. Mais c’est aussi un roi de la Com ! Non seulement son œuvre de 22 livres, « De Civitate Dei contra paganos » a été la plus recopiée pendant tout le Moyen Âge occidental, mais encore il est le seul Algérien à s’être fait dédier une église dans le centre de Paris, France (entre autres). Et les résonances politiques, religieuses culturelles de la "Cité de Dieu" ont été immenses dans l’histoire de l’Occident.


Manuscrit du XVème Siècle


Côté recension, l’affaire est plus délicate, car ce pavé dans la mare Méditerranée contient beaucoup de ch-arabia. Il faut donc le décrypter avec soin pour en tirer la « substantifique moelle ».

D’abord les faits, avec les grandes dates :

376 : Division entre Empire d’Orient et Empire d’Occident



Empire romain d'Occident et d'Orient

386 : Baptême d’Augustin, né en 354.

410 : Sac de Rome par le Wisigoth Alaric.

412 à 424 : Écriture de « La Cité de Dieu »

430 : Mort d’Augustin dans Hippone - future Bone, puis future Annaba - assiégée par les Vandales.


Genséric

 http://chez-imalyne.skyrock.com/3221526129-Attila-le-Hun-&-Genseric-Roi-des-Vandales-ou-le-commencement-de-la-fin.html

476 : Fin de l’Empire romain d’Occident

Tout au long de son histoire, l'Empire d'Occident connut un déclin économique constant, qui contribua à sa chute finale, tandis que l'économie de l'Empire d'Orient restait stable, notamment grâce aux richesses de l'Asie Mineure. L'Orient pouvait entretenir une armée importante, renforcée au besoin de mercenaires, là où l'Occident n'en était plus capable.


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Vous pouvez voir notre article sur Corseul :




http://phenicienkersco.blogspot.fr/search/label/a%2014%20-%20SILICIA%20NAMGIDE%20%C3%80%20CORSEUL


 Et sur la Légion Maurétania :



http://dakerscomerle.blogspot.fr/search/label/a%2052%20-%20LEGIO%20III%20AUGUSTA%20and%20Co

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Entre 410, fin de la saga où « Rome seule peut Rome faire trembler » et 476 fin de l’Empire romain d’Occident, il s’est écoulé 66 ans. Si, sans jouer les Nostradamus, on prend la date de 1962 comme celle de la séparation de la France de son empire colonial, et on y ajoute 66 ans, que se passera-t-il en 2028 ?

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Le 24 août 410, Rome fut pillée pendant trois jours : elle n’était plus invincible. L’opinion publique, chrétienne ou païenne, répétait : « C’est sous des princes chrétiens, pratiquant de leur mieux la religion chrétienne que de si grands malheurs sont arrivés à Rome. » Et un éminent fonctionnaire, Volusien, ajoutait : « La prédication et la doctrine chrétienne ne conviennent nullement à la conduite de l’État, car voici, dit-on, ses préceptes : Ne rends à personne le mal pour le mal ; si quelqu’un te frappe sur la joue, présente-lui l’autre ; à celui qui veut t’enlever ta tunique, abandonne aussi ton manteau. Il semble clair que de telles mœurs ne sauraient être pratiquées dans un pays sans le conduire à la ruine. »

Répondre aux objections présentées à Augustin, tel est le but en même temps que le plan de "La Cité de Dieu".


La Cité de Dieu comprend 25 « livres ». En fait, ce sont autant de chapitres. Ils sont résumés brièvement, car si Augustin avait tout son temps, le temps est compté aux internautes du XXIème siècle.

LIVRE I
Augustin traite les non-chrétiens du qualificatif d’ « iste » péjoratif (contrairement à « ille » qui est laudatif). Vingt ans auparavant, l’empereur Théodore avait interdit le culte rendu aux dieux romains et fermé leurs temples. Cela n’avait pas plu à leurs adeptes, qui avaient rejeté la responsabilité des malheurs de Rome sur les chrétiens. Augustin les traite d’ingrats, car le malheur doit être subi avec dignité et courage et non pas en personnes dépravées, dont la cupidité est la racine de tous les maux. Et il conseille d’amasser des trésors non sur terre  mais dans le ciel où les voleurs ne pénètrent pas. Et d’invoquer le courage inutile pour cause de respect des dieux de M. Regulus, chef des armées du peuple romain, captif à Carthage. Il est envoyé à Rome pour discuter de l’échange des prisonniers respectifs, et jure sous serment de venir se constituer prisonnier à nouveau en cas d’échec. Il déconseille au Romains de poursuivre dans cette voie et revient à Carthage se constituer prisonnier, et il est torturé : on l’enferme dans un coffre étroit, hérissé de clous aigus, où contraint de se tenir debout, il ne peut s’appuyer d’aucun côté sans d’horribles souffrances.

Augustin condamne aussi bien le suicide que l’assassinat, avec quand même une exception : quand l’ordre de tuer vient de Dieu ! Aussi n’accuse-t-on pas Abraham de cruauté, mais on loue sa piété, quand, meurtrier par obéissance, il veut frapper son fils. Il se demande aussi pourquoi l’Église célèbre avec dévotion les saintes femmes qui, pour échapper au déshonneur, se sont noyées dans le fleuve ! Et que dire du soldat qui tue par obéissance à l’autorité légitime, et qui n’est tenu d’homicide devant aucune loi civile ; s’il ne frappe, il est coupable de trahison et de révolte … Il évoque aussi le souvenir de Scipion Nasica qui s’opposait à la destruction de Carthage, contrairement à Caton, parce que la crainte - envolée - laissait la place à l’appétit de domination. Et de jeter l’anathème : « vous imputez au christianisme le mal dont vous souffrez ; car dans la sécurité, ce n’est pas la paix de la république, c’est l’impunité du désordre que vous aimez ; la prospérité vous a dépravés, et l’adversité vous trouve incorrigibles. »

LIVRE II
Bien avant que paraisse le christianisme, les dieux n’ont pas empêché les malheurs de Rome. Les cultes en l’honneur des dieux nourrissent l’image de l’immoralité : la corruption religieuse entraîne la corruption morale qui entraîne la corruption politique. On ne demande plus à l’État que la sécurité, tandis que l’on vaque à ses plaisirs.


L’ignorance a fait naître ce proverbe : « il ne pleut pas, les chrétiens en sont la cause ». Dans ses attaques contre l’institution romaine, il cite Salluste : chez les Romains du temps des rois, le juste et l’honnête régnaient autant par la conscience que par la loi. Mais dès le temps même où la république passa des rois aux consuls, les injustices des puissants provoquèrent la séparation du Sénat et du peuple, et d’autres dissensions intérieures, surtout après la ruine de Carthage. Or toutes ces turpitudes se sont produites avant le christianisme, donc il exhorte les Romains à ouvrir les yeux.
 

 Livre III
Les dieux regrettés n’ont pas soutenu Rome : que les adorateurs de ces dieux cessent d’imputer au Christ des malheurs ou des guerres civiles qui n’ont jamais épargné Rome et ont causé la ruine de la République bien avant que le Christ ne paraisse dans l’histoire. L’extension de l’empire romain, cause de nombreuses guerres était-elle nécessaire ? On en revient toujours au temps des rois : « Alors la vie des hommes s’écoulait exempte de cupidité. Rome vécut plus heureuse avec moins de dieux. Mais à mesure qu’elle se développa, elle crut devoir en employer davantage : un plus grand navire veut plus de matelots. » Augustin passe en revue l’histoire de Rome pour dénoncer tout le sang versé lors des multiples batailles, ou lors des luttes pour la prise du pouvoir.

  

 Livre IV
Augustin ridiculise les divinités romaines, ce polythéisme qui fournit un dieu pour chaque activité humaine, petits dieux insignifiants ou grand dieu comme Jupiter. Les dieux sont bien l’œuvre des hommes. Il faut distinguer superstition et religion, comme le peuple juif qui n’eut jamais besoin de tous ces dieux pour être délivré. Le méchant qui règne est esclave d’autant de maîtres qu’il a de vices. Sans la justice, les royaumes ne sont que des grandes troupes de brigands. Et de citer Ciceron sur la réponse que fit à Alexandre le Grand ce pirate tombé en son pouvoir :
- À quoi penses-tu, lui dit le roi, d’infester la mer ?
- À quoi penses-tu d’infester la terre ? répond le pirate avec une audacieuse liberté. Mais parce que je n’ai qu’un frêle navire, on m’appelle corsaire, et parce que tu as une grande flotte, on te nomme conquérant.


Augustin  cite encore Justin, historien latin de la Grèce, qui traite ainsi Ninos, roi des Assyriens, qui ruina, par une soif de commander jusqu’alors inconnue, les antiques traditions de sa propre patrie. Il conclue : "Faire la guerre à ses voisins pour s’élancer à de nouveaux combats, écraser, réduire des peuples dont on n’a reçu aucune offense, seulement par appétit de domination, qu’est-ce autre chose qu’un immense brigandage ?"

Et Augustin fait la liste de tous les dieux, il y en a une cinquantaine, en se moquant de l’usage quotidien qu’en font les Romains, et de ces fameux jeux dédiés à ces dieux imaginaires. Car on peut sucer le lait sans la déesse Rumina, dormir dans un berceau sans Cumina, boire et manger sans Éduca et Potina, s’aimer sans Priapus, moissonner sans Segetia, soutirer le miel sans Mellona, élever des bœufs sans Bubona, ou manger des fruits sans Pomona !

Livre V
Si les dieux ne sont pas la cause de la grandeur de Rome, quelle est donc la raison de cette grandeur ? Quelles étaient donc les vertus des Romains pour que Dieu daignât prêter son assistance aux progrès de l’Empire ? Salluste et Virgile sont appelés à la barre : « Toi, Romain, souviens-toi de ranger les peuples sous ta loi ; voilà ta science : être l’arbitre de la paix. Épargner les vaincus et dompter les superbes. »

À l’inverse, « Rome corrompue par le luxe et l’oisiveté, la République à son tour soutint de sa grandeur les vices de ses gouvernants. » Augustin prend à témoin Posidonius, Hippocrate, Nigidius, Homère, Sénèque, Cotta, Barbus, etc … et il veut montrer qu’après la liberté, les Romains ont la domination tellement à cœur qu’ils en font une gloire, prenant pour Dieu les dons de Dieu. Et il cite en exemple Cincinnatus, ne possédant pour tout bien que quatre arpents qu’il cultive de ses propres mains, et tiré de sa charrue pour  devenir dictateur, plus que consul ! et que vainqueur, couvert de gloire, il demeure fidèle à la pauvreté.

Augustin apprend qu’on prépare contre lui une réponse et avertit les auteurs de ne pas attaquer ses thèses par des bouffonneries satiriques et souhaite que le ciel les préserve de la liberté de nuire.


Livre VI et suivants
C’est avec des philosophes qu’Augustin entreprend maintenant de discuter sur les fondements et les structures de la religion romaine. Et c’est une longue suite de paragraphes immenses, tirant à boulets rouges sur les dieux, Jupiter en tête. Il s’oppose à Varron, aux philosophes platoniciens. Au livre IX, il est contre la distinction entre les bons et les mauvais « démons ». Au livre X, il plaide pour le bonheur du culte d’un Dieu unique.

Sa conclusion, à la fin de ce premier tome est : « J’ai, grâce à l’assistance du vrai Dieu et Seigneur, satisfait aux vœux de quelques-uns, en réfutant les contradictions des impies qui préfèrent leurs dieux au fondateur de la cité sainte. De ces dix livres les cinq premiers sont dirigés contre ceux qui s’attachent au culte des dieux pour les biens de la vie présente, et les cinq derniers contre ceux qui les maintiennent dans l’intérêt de la vie future. La suite remplira les promesses du premier Livre. Je veux, autant qu’il me sera possible, avec l’aide de Dieu, développer l’origine, le progrès et la fin des deux cités que le siècle nous présente mêmes et confondues ».