ROCHES CONSEILLER d'ABD EL-KADER
Création : 19 septembre 2011
Léon Roches a eu le don, partout où il est allé, de se faire des amis musulmans, et pas des moindres. Il débarque à Alger rejoindre un père qui voulait faire fortune dans la colonisation, mais qui fait faillite. Pour l’amour platonique d’une belle musulmane, il apprend l’arabe.
Or le nouveau mari de la belle la conduit du côté de chez Abd el-Kader. Léon apprend alors les rites musulmans et décide de devenir conseiller du chef de guerre. Il réussit au point de devenir son ami et devient son bras droit militaire, économique et diplomatique, sous son nom islamique de Sidi Omar oul’d Rouches.
Il veut convertir Abd el-Kader à l’entente pacifique avec la France. Abd el-Kader veut l’intégrer à la sphère musulmane et le marier à une fille de sa mouvance. Mais les failles du traité de la Tafna laissent l’ambiguité sur les limites du partage du territoire et sur la volonté française de le respecter. Aussi bien que les Français, Abd el-Kader veut en profiter au prix d’une guerre acharnée : les coutumes de l’Islam l’y autorisent. Roches essaie de l’en détourner, en vain.
Alors, il démissionne et avoue à celui dont il est l’ami dévoué qu’il n’est pas musulman. Fureur d’Abd el-Kader ( Joueur de religion ! répétait-il, consterné ), mais pour qui l’amitié est plus forte que la rigueur. Roches revient dans les lignes françaises et se met en tête de faire avaliser une fatwa par les sommités religieuses de Kairouan, puis du Caire, où il rencontre Méhémet Ali, puis de la Mecque où il participe au pélerinage. Mais cette fatwa, introuvable, serait toujours valable !
Nul doute qu’Abd el-Kader, quand il s’est agit de demander l'aman - sous forme de cessez-le-feu - puis pendant sa résidence forcée en France, ait pensé profondément à son ami Sidi Omar oul’d Rouches et à sa dernière lettre lui faisant part de cette fatwa ainsi que de l’aman promis par le général Bugeaud en cas de cessation des combats. L’œcuménisme dont il a fait preuve dans la fin de sa vie n’est sans doute pas sans rapport avec cette amitié.
Les mille et une péripéties de l’Aventure de Léon Roches sont racontées dans son livre «32 ans à travers l’Islam» édité en 1887. Ce livre a été réédité sous le titre «10 ans à travers l’Islam» en 1904, Roches n’ayant pas eu le loisir de relater les 22 dernières années.
Puis il veut se faire Jésuite, rencontre le pape Grégoire XVI, mais Bugeaud le considère comme déserteur. Arbitrage du pape en faveur de Bugeaud, dont Roches devient l’adjoint écouté puis l’ami ; il rencontre la famille royale, entretient une correspondance plus qu’amicale avec Abd el-Kader.
Il a 35 ans ! Il devient consul de France au Maroc, en Tunisie, et un proche du bey de Tunis à qui il fait rencontrer Napoléon III à Alger ... et enfin Ambassadeur de France au Japon, en pleine guerre civile. Il devient alors l’ami des Japonais et apporte son concours à l’édification d’un Japon moderne au début de l'ère Meiji ...
Quant à penser que Léon Roches en a trop fait dans sa vie pour que ce soit vrai, libre à chacun de le croire, même s'il serait incapable de l'imiter.
Nous avons proposé à Claude Lelouch de faire un film sur la saga de Léon Roches. Nous n'avons entendu que le bruit des ailes du silence.