HORS LA LOI



Création le 30 septembre 2010
 

Modification le 24 février 2012 : Fête de l'indépendance à Sétif - 1962

Par la nature des choses, l'Algérie se devait d'être souveraine. Par la force des choses, tout cela s'est transformé en empoignade sanglante, au grand dam des Algériens eux-mêmes. Moment mal choisi, au sortir d'une guerre mondiale qui a laissé la France moralement et économiquement exangue ? impréparation des esprits ? époustouflantes erreurs d'imprévision ? appétit d'en découdre de part et d'autre, et ce dans l'air du temps ???


Étant donné le talent qu'il a déployé pour le film "Indigènes", Rachid Bouchareb était attendu "grave" pour qu'il fasse "les pieds au mur" au suivant. Il fallait - au moins - un film pour mieux faire comprendre cette période troublée. Bouchareb en a pris le risque, c'est à son honneur. Mais qui lui a dit : "Attention, Rachid, fais gaffe : ceci ou cela, au mieux c'est contestable, au pire c'est faux." ? 


Du coup il s'est fait critiquer pour des raisons qui n'ont rien à voir avec l'esprit de son film. Dans la lignée de ce mollah iranien qui, à propos du livre "Les versets sataniques" de Salmon Rushdie, avait rétorqué à quelqu'un qui lui demandait s'il avait lu le livre : "il n'y a pas besoin de lire un livre pour le condamner !"

Revenons au film. C'est une tragédie cornélienne. Il enveloppe d'une lumière particulièrement crue l'obscur alexandrin de Rodogune, la princesse des Parthes : "Serment fallacieux, salutaire contrainte, que m'imposa la force et qu'accepta la crainte." Il pose la lancinante question : quand on veut se révolter contre un pouvoir en place, jusqu'où peut-on aller sans perdre son âme ? Quelle est la légitimité d'un assassinat ? Dans quelle mesure a-t-on le droit moral de provoquer sciemment une répression ? Quelles seront les conséquences psychologiques et/ou psychiatriques d'un comportement qui finit par devenir une seconde nature ? Quelles seront les responsabilités d'un pouvoir qui devra faire avaler à ses compatriotes que ceux d'en face sont des salauds et que les siens sont des anges ? Enfin, dernière interrogation et non la moindre, tout ça pour ça était-il vraiment nécessaire ? Le film est encore plus : une ode à la désespérance, mais aussi un appel subliminal à la raison et à l'humanisme. Rien à voir avec l'apologie du FLN en action, ou à une quelconque mission de propagande.

Les acteurs sont excellents, on a l'impression qu'ils rejouent leur rôle de l'époque. Les faiblesses du début, et les séquences colorisées low-cost de la fin pourraient être retravaillées : pourquoi sortir des images des fêtes de l'Indépendance à Alger, alors que Saïd et ses frères étaient réputés être sétifiens ? Il fallait donc sortir des images de Sétif, en couleur, ... qui existent bien, mais qui sont niées par les autorités algériennes locales, parce que tournées par un Français ( ? ! ). Ainsi va le monde de la propagande.