CHEF DE SAS A BOUZEGUENE

 
Création le 10 février 2010
Modification 1 : 28 mars 2013

Il y a énormément de livres sur la guerre d'Algérie, côté français. Des très bons et des moins bons. Nous avions donc l'embarras du choix. Et s'il n'en reste qu'un, ce sera celui-là, parce qu'il est très humain, mais aussi à cause des liens conservés avec le village de Bouzeguene où Claude Grandjacques a été chef de SAS de l'été 1960 à fin 1961.

Des Miages aux djebels - Claude Grandjacques - Editions Mémoire et Regards

Trois hommes d'une même famille, trois frères, dans la tourmente de la guerre d'Algérie, cela fait penser aux trois Horace aux prises avec les trois Curiace, invisibles eux ; la malédiction cornélienne accable l'un d'eux, mortellement atteint.

Nos jeunes gens sont plutôt écrivassiers, et à travers leurs correspondances, nous revivons les petits riens qui servent à rassurer l'être lointain, aussi bien que les moments les plus émouvants. L'auteur a mis la musique d'ambiance, c'est à dire l'évocation tout au cours du livre de tranches d'histoire du passé et du présent de l'Algérie.

On y trouve des souvenirs authentiques, tels que le réflexe de ne pas saluer le premier les sous-officiers quand on devient nouvel officier. Mieux : le rendez-vous manqué à Marseille avec un habitant de Bouzeguene, l'aérodrome pour l'un, phonétiquement "la rue de Rome" pour l'autre !

 
Il y a aussi l'éventail des affectations : Les chasseurs alpins pour le premier, l'artillerie pour le second, la légion puis la SAS pour le troisième. Et des photos en masse.

Puis on en vient à des moments durs : celui du blessé FLN amené sur un brancard au PC et que le capitaine ordonne de faire disparaître, ou celui de l'assassinat du notable de bonne volonté par une petite frappe du FLN.

Mais Racine, quant à lui, dépeignant les hommes tels qu'ils sont, cela peut devenir tragique. Vous avez dit tragique ?

- D'abord en ce qui concerne la population : pour aller à la ville, il faut un laisser-passer dans la zone interdite qui y conduit, laisser-passer qu'il faut aller chercher dans la même zone interdite, sans laisser-passer, au point diamétralement opposé. Quant à la SAS, elle a bien des véhicules, mais pas de crédit pour acheter de l'essence ...

- Ensuite, ne voulant pas transformer ses administrés en assistés, le chef de SAS décide de leur vendre la farine au lieu de la distribuer, et les paie pour faire des travaux d'utilité publique dont le village manque cruellement. Sa hiérarchie n'arrive pas bien à comprendre pourquoi il vend cette farine et ce qu'il fait de l'argent, d'une part, et pourquoi il achète des matériaux et comment il se procure de l'argent d'autre part. Élémentaire, mon cher Watson !

- Enfin, le préfet et le général se mettent à deux pour lui foutre 30 jours d'arrêt de rigueur ferme, parce qu'il est allé voir un copain qu'il ne savait pas être sympathisant de l'OAS, comme si c'était marqué sur son front. Et son épouse esseulée, pendant ce temps-là, direz-vous ? Madame la Générale et madame la Préfète l'auraient-elles invitée à prendre juste une tasse de thé pour Noël ? La réponse est ...  ( là, nous  apportons notre propre expérience ; on ne fraie pas avec le petit personnel technique ! ).


Et comme la sanction n'était pas assez forte à leur gré, ils l'ont interdit de séjour en Algérie !!!  Fichtre. C'est exactement le vœu que formaient la plupart des petits gars du contingent à l'époque. Heureusement que l'indépendance aidant, l'interdiction est tombée à l'eau. Et comme l'a dit Pierre Dac, quand les bornes sont franchies, il n'y a plus de limites.

Notre ami est retourné 40 ans plus tard en Algérie à Bouzeguene, qu'il n'a pas reconnu tellement les constructions avaient poussé. Il a d'abord eu affaire à l'adjoint à l'Assemblée populaire communale (Conseil municipal) qui lui a fait passer une petite interrogation de géographie, se méfiant d'avoir affaire à un faux ancien combattant (il en a peut-être l'habitude ... car il y en a de plus en plus en Algérie). À la fin il lui a donné une note : 16/20. Il y avait donc une faute ? La population l'a néanmoins accueilli avec la plus grande gentillesse.

Rejoignons Claude Grandjacques dans ses montagnes. Quelle note pour le livre ? demande l'écho. Allons, soyons fous, cela doit tourner dans les 19/20.

http://www.miages-djebels.org/

Pour terminer, allons dans les djebels. Surprise : le village s'est doté de blogs internet ! Dans l'album de photos figurent celles de Claude Grandjacques et en particulier les trois petites demoiselles en tête de cet article. Un très bon point pour ce village (ville ?) modèle et moderne.

http://bouzeguene-historique.e-monsite.com/
http://aitsaid-bouzguene.blogspot.com/

Laissons le mot de la fin aux "sages" de Bouzeguene :

"Le Bouzeguène d'hier explique sans nul doute le Bouzeguène d'aujourd'hui. La connaissance du passé devrait alimenter le présent pour bâtir un avenir meilleur. Ces photos et les textes en liens sont dédiés à la jeunesse éternelle, à ceux qui ont cru et croient toujours en elle !... "