RECENSION DU FILM SÉTIF 1962

 
Création : le 13 novembre 2017

Modification 1 : le 6 février 2021


Malik Rahal, née en 1974 à Toulouse, est une historienne française. Spécialisée dans l'histoire de l'Algérie et plus généralement du Maghreb contemporain, elle est chargée de recherche à l’Institut d’histoire du temps présent (IHTP), une unité du CNRS.
 

Après avoir été professeur dans un collège en Seine-Saint-Denis, elle a été Maître de conférence à l'Université de Nottingham avant d'être recrutée au CNRS. Elle enseigne à Sciences-po Paris et à l'INALCO.

Elle a écrit de nombreux articles sur la possibilité de faire de l'histoire portant sur la période post-indépendances et fait partie des premiers historiens à s'attacher à cette période. Elle anime un carnet de recherche en français, anglais et arabe intitulé Textures du temps, dans lequel de nombreux jeunes historiennes et historiens, travaillant sur l'Algérie contemporaine, partagent leurs travaux et leurs questionnements, et où ils réagissent en historiens à l'actualité.

***********************

Elle a fait la recension du film que nous avions pris les 4 et 5 juillet 1962 à Sétif. Pour voir ce film :

https://www.youtube.com/watch?v=S-EDGM6e2tI 

 Après nous avoir rencontré, Malika Rahal a écrit une version "actualisée" de ce film :

__________________________________________________

Les fêtes de l’indépendance

par Malika Rahal, historienne, Institut d’histoire du temps présent (CNRS) - 2017

Le film de l’indépendance

Sétif, juillet 1962. Le décor, c’est d’abord les rues et les murs couverts d’affiches : «Référendum OUI à l’indépendance»; «La révolution pour vaincre la Misère»... Dans le stade de la ville, un meeting est organisé à la veille de l’indépendance. D’abord, la foule se promène sans but, profitant de l’atmosphère. Puis la foule immense se presse. Il fait chaud en juillet, et, dans la mêlée, un homme est chargé de faire boire les enfants d’une bouteille. À l’orateur inconnu succède une oratrice ; derrière elle, trois combattantes en tenues kakis. Un autre homme est à la tribune : les lunettes sombres de Benyoucef Benkhedda, le second président du Gouvernement provisoire de la République algérienne sont reconnaissables entre mille.

Alain Olmi qui tient la caméra ce jour-là, avait été «officier des affaires algériennes», il avait été nommé adjoint de Section administrative spécialisée, près de Sétif. Il raconte : « Le jour de l’indépendance, j’étais en civil. J’ai suivi la foule, je me suis retrouvé par hasard au grand meeting qui avait lieu au stade de Sétif. J’étais placé très haut, accroché à un grillage, les gens me soutenaient » .

Ses images nous plongent dans la rue, au cœur même de la foule. Les drapeaux couvrent monuments et immeubles et les enfants portent des tenues de fêtes tricolores au milieu de dizaines de vélos, des carrioles et des camions. Et puis, il y a encore ces index levés, sans que la bande son ne nous indique ce qu’on invoque ou qu’on chante avec ce geste. Dans ce montage de 13 minutes, Alain Olmi conserve aussi les images d’un grand rassemblement à l’extérieur de la ville, un champ où l’on vient de loin pour se rassembler et défiler vers la ville. On danse aussi. 

 

Même en l’absence de son correspondant à l’événement, les images seules disent le retentissement sonore de la foule. Les corps saisis par l’image animée dans leurs battements et leurs saccades disent mieux que les photographies la sonorité du moment. On chante, on crie, on applaudit. Une jeune femme scande de la main sur le toit de la voiture, et on reconnait aussitôt le rythme : Ta-hyal ja-za-ir (-----). 

Une autre, agrippée à sa voiture, bat la mesure sur sa propre cuisse, et on lit sur ses lèvres : «Ta-hya--Ta-hya--». Tels des chefs d’ orchestre, de jeunes hommes encadrent les portions de défilé. On défile en tous sens, par sous-groupes : ici passe un groupe de scouts, là un autre, ou une école, ou un syndicat, ou une association. Une femme un peu âgée soulève son haïk noir et traverse seule la rue, très vite, en tenant à bout de bras la hampe d’un drapeau. C’est la dernière image du film, et elle est répétée par deux fois au montage : sans doute a-t-elle touché Alain Olmi, comme elle touche les spectateurs d’aujourd’hui. 

 ____________________________________________

 Ceci, suite à la première recension très pertinente qu’elle avait faite du film  dont elle a retrouvé la trace en consultant le numéro spécial du journal algérien El Watan sur le cinquantenaire de l’indépendance de l’Algérie, dont la dernière de couverture nous était consacrée. À propos de ce film, Alain Peyrefitte, ancien ministre du général de Gaulle, nous a confié en 1996, que nous avions été « gonflé » de servir ainsi de témoin de l’histoire !

Cette recension se trouve dans le site de "Texture du temps" :

https://texturesdutemps.hypotheses.org/2629


***************************

 Mais aussi, il y a cela :

http://dakerscomerle.blogspot.fr/search/label/5%20-%20MONSIEUR%20JACQUES%20...